Pretty Woman est un film américain réalisé par Garry Marshall, sorti en 19901.
Edward Lewis, un richissime homme d’affaires, est un raider d’entreprise qui achète des sociétés en difficulté pour les démolir et les revendre pièce par pièce. Perdu un soir à Hollywood, il demande son chemin à une prostituée, Vivian, et lui propose de conduire à sa place. Le ramenant à l’hôtel, la jeune femme en profite pour tester la voiture et donner à Lewis des conseils quant à sa conduite. Une fois arrivés à l’hôtel, Edward propose à Vivian de l’engager pendant une semaine en tant qu’escort girl, le temps qu’il doit rester en ville, afin qu’elle joue le rôle de son ancienne petite amie qui vient de le quitter. Vivian accepte. Au fil de la semaine, Edward commence à voir Vivian sous un jour différent et tombe sous le charme. Il finit par s’ouvrir à elle, lui révélant sa vie personnelle et professionnelle. Ils finissent par tomber amoureux.
Dans l’interaction suivante, on retrouve un schéma d’initiation de Vivian à un art légitime – l’opéra – par Edward. Lui est coutumier de ces espaces sociaux, ne se soucie pas de leur retard, sait choisir les meilleures places. Elle ne comprend pas comment se servir des jumelles de salle et le lexique approprié lui fait défaut (c’est ainsi qu’elle nomme l’orchestre « the band« ). Cette scène permet de saisir les prédispositions et autres techniques du corps2 incontournables pour ne pas se ridiculiser dans des espaces où ils sont le principal support de distinction3 (malgré son approche bienveillante, Edward esquisse un sourire à chaque fois que Vivian faute). Mais elle illustre aussi l’impression, au sein de la classe bourgeoise, que ces prédispositions, tout comme le goût du « sublime », sont des caractéristiques innées des individus (« soit on adore, soit on déteste. Si tu adores, tu adoreras toujours. Sinon, on peut apprendre à apprécier, mais on n’y mettra pas son âme ») renvoyant à l’idéologie du don chez Bourdieu. Le fait que Vivian se montre touchée pendant la pièce a un effet quasi-révélateur surtout pour lui, le rassurant sur le fait qu’elle est plus qu’une prostituée. La socialisation de Vivian l’empêche néanmoins encore une fois d’avoir les mots appropriés pour décrire ce qu’elle a ressenti (« j’ai failli en faire pipi dans ma culotte ») face à sa voisine, bourgeoise âgée.
- Cette fiche est inspirée d’une recommandation de Quentin Amalou, auteur d’une note à ce sujet : https://cineshs.hypotheses.org/19
- Marcel Mauss, « Les techniques du corps », Journal de Psychologie, 1936
- Pierre Bourdieu, La distinction. Critique sociale du jugement, 1979.